Il existe un énorme fossé entre les Inuits et le reste de la société canadienne en ce qui a trait à la santé. Les Inuits ont effectivement une espérance de vie beaucoup plus courte que le reste de la population, ainsi qu’ un taux de mortalité infantile plus élevé. Ils affichent le plus important taux de suicide de tous les groupes au pays, et sont aux prises avec un nombre disproportionné de maladies infectieuses. Ces écarts s’ expliquent en grande partie par la conjoncture socio-économique des communautés inuites, caractérisée par la pauvreté, le faible degré d’ éducation, le peu d’ occasions d’ emploi et des conditions de logement déplorables.

L’ Organisation mondiale de la Santé définit les déterminants sociaux de la santé comme « les circonstances dans lesquelles les individus naissent, grandissent, vivent, travaillent et vieillissent ». Ces circonstances « dépendent de la répartition du pouvoir, de l’ argent et des ressources à tous les niveaux, mondial, national et local. Les déterminants sociaux de la santé sont l’ une des principales causes des inégalités en santé, c’ est-à-dire des écarts injustes et importants que l’ on enregistre au sein d’ un même pays ou entre les différents pays du monde ».

Après un examen global de la documentation disponible sur la santé des Inuits, et au terme de consultations auprès de représentants d’ organisations, d’ agences et d’ administrations inuites, les principaux déterminants sociaux ont été résumés en 11 facteurs, soit :

• la qualité du développement de la petite enfance
• la culture et la langue
• les moyens de subsistance
• la répartition du revenu
• le logement
• la sécurité personnelle
• l’ éducation
• la sécurité alimentaire
• la disponibilité des services de santé
• la santé mentale
• l’ environnement

Données sur l’ état de santé des Inuits

De nombreux indices qui sont utilisés à l’ échelle nationale révèlent l’ étendue des problèmes qui nuisent à la santé des Inuits au Canada. L’ espérance de vie des habitants de l’ Inuit Nunangat (y compris les non-Inuits) est de 70,8 ans, un nombre bien en deçà de la moyenne canadienne de 80,6 ans.

Le suicide est un signe concret de détresse socio-économique et une manifestation importante de l’ exclusion sociale. Il frappe particulièrement les hommes inuits âgés de 15 à 24 ans. Dans l’ Inuit Nunangat, si l’ on compare au reste du Canada, les chances qu’ un enfant ou un adolescent soit emporté par le suicide sont multipliées par trente, voire plus. D’ ailleurs, dans cette région, le suicide est à l’ origine de près de la moitié des décès chez les jeunes, comparativement à environ 10 % ailleurs au pays.

De nombreux problèmes de santé sont causés par les logements médiocres et bondés, le chômage, l’ accès marginal aux services de santé, l’ insécurité alimentaire et d’ autres facteurs comportementaux et environnementaux. Un sondage sur la santé des enfants réalisé au Nunavut a montré qu’ au cours de l’ année précédente, environ 31 % des nourrissons inuits de moins d’ un an avaient été hospitalisés pour cause de bronchite, et 42 % des enfants avaient eu besoin de traitements pour une maladie respiratoire. Le nombre élevé de bronchiolites et autres infections des voies respiratoires a été attribué au surpeuplement des demeures, à la fumée secondaire et à la faiblesse immunitaire. Par ailleurs, au Nunavik, près de 60 % des bébés de neuf à quatorze mois sont anémiques (en raison, surtout, d’ une mauvaise alimentation).

Le nombre d’ Inuits souffrant de tuberculose est considérablement plus élevé que dans la population canadienne non autochtone (262/100 000, comparativement à 0,7/100 000). Quant aux maladies chroniques comme le diabète, l’ hypertension artérielle et les maladies du cœur, les Inuits ne sont pas plus nombreux à en souffrir que les autres habitants du pays. Vu les changements dans l’ alimentation et le mode de vie des Inuits, il faut impérativement un suivi régulier et des approches efficaces de prévention, de contrôle et de soins.

Les communautés inuites sont également aux prises avec des problèmes de toxicomanie. Les adultes y sont parmi les plus nombreux à fumer la cigarette au Canada : 54 % des personnes de 18 ans et plus fument au quotidien, y compris 56 % des femmes enceintes, ce qui augmente de façon préoccupante le risque de complications liées aux fausses couches, au développement du fœtus, au poids de naissance, aux accouchements prématurés et au syndrome de sevrage chez les nourrissons.

Le caractère généralisé des comportements à risque élevé dans les communautés inuites, comme l’ abus d’ alcool et le tabagisme, est un symptôme de problèmes plus profonds, et un héritage laissé par la colonisation. Les inégalités socio-économiques sous-jacentes sont une source de stress importante au quotidien, et les mécanismes d’ ajustement nocifs doivent être considérés comme des facteurs clés des principaux déterminants de la santé.

État actuel de la recherche

On trouve de plus en plus d’ écrits sur la sécurité alimentaire, l’ accès à des soins adéquats, le logement, l’ acculturation, la littératie et la santé, le bien-être psychologique et communautaire, la récolte de subsistance ainsi que le suicide. Conjointement aux données recueillies dans le cadre d’ études, ces textes offrent une perspective de l’ état de santé des Inuits plus englobante que celles qui sont fondées sur les indicateurs les plus répandus, axés sur des problèmes de santé comme la mortalité infantile ou la prévalence des maladies infectieuses.