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atlas des peuples autochtones du Canada

Le mode de vie des Métis

Autrefois, les familles et les communautés métisses parcouraient le territoire au rythme des cycles de vie de la faune et de la flore, en adaptant leur quotidien selon la saison. Ainsi, elles devaient faire preuve de souplesse pour pouvoir collaborer dans les périodes d’abondance ou travailler de manière indépendante lorsque les ressources se faisaient rares. Les habitudes saisonnières étaient également influencées par la disponibilité des emplois et la culture des légumes et des céréales. Une famille métisse pouvait, par exemple, aménager un jardin dans sa communauté et semer un peu de blé à la fin du printemps et au début de l’été. Ou encore, elle pouvait chasser le bison à la fin de la saison chaude, cueillir des baies en automne, trapper ou s’installer dans un campement de chasse au bison en hiver, puis pêcher à l’arrivée du printemps.

De nos jours, les Métis qui choisissent un mode de vie traditionnel continuent de suivre le rythme des saisons, et c’est la nature qui leur signale le moment d’entreprendre ou de terminer une activité. Par exemple, pour les Métis de la Paddle Prairie, au nord de l’Alberta, le cycle des saisons commence en niskipisim, ou à la lune de l’oie (en mars), quand les oies commencent à migrer vers leur site de nidification dans le nord, annonçant ainsi l’arrivée du printemps. Il est alors temps de brûler l’herbe, la paille et les feuilles mortes afin de faire renaître la forêt et les prés.

Les conditions météorologiques ont aussi leur rôle à jouer dans l’exploitation des ressources. Par exemple, les sécheresses, assez courantes dans les Prairies, nuisent à la chasse au bison, à l’orignal, au wapiti (cerf), au chien de prairie à queue blanche et au cerf mulet, ainsi qu’à la croissance des baies d’amélanchiers et d’aronia. Dans ces circonstances, les Métis qui vivent au rythme des saisons doivent donc remplacer ces ressources limitées par d’autres : ainsi, ils doivent souvent parcourir de bonnes distances pour trouver de nouvelles ressources. Cela peut les amener à pratiquer la trappe et à chasser un gibier plus petit, comme le rat musqué et la grande poule-des-prairies (tétras à queue fine), ou encore à pêcher le brochet, le doré jaune ou l’esturgeon. Le cycle des saisons n’est donc pas unique, mais pluriel.

Ce rythme de vie est en soi un exercice spirituel; car celui qui y adhère s’inscrit dans un système holistique qui inclut toute la création. En effet, les ressources que le Créateur offre aux humains doivent être partagées entre tous. Ainsi, lorsque les Métis les exploitent, ils suivent un mode traditionnel et lui font toujours une offrande (habituellement du tabac ou du thé), à défaut de quoi la communauté risque de perdre la ressource en question.

La médecine traditionnelle métisse

Les Métis ont, comme presque tous les peuples autochtones, leur propre médecine traditionnelle. Holistique, celle-ci se concentre sur les facultés mentales, émotionnelles, physiques et spirituelles de la personne. Autrefois, le rôle de guérisseuses et de sages-femmes incombait aux femmes, qui étaient notamment chargées d’administrer un grand nombre de remèdes (la michinn, en michif) pour soigner les membres de la famille et de la communauté. De nos jours, cependant, ce rôle est devenu mixte. Rose Richardson, de Green Lake en Saskatchewan, figure parmi les guérisseuses les plus respectées de la Nation métisse.

Les remèdes des Métis sont presque toujours conçus à partir de plantes traditionnelles, à l’exception de quelques-uns, introduits par leurs ancêtres européens. La plupart des remèdes métis sont produits à partir de ce qu’on trouve localement dans la nature, et beaucoup d’entre eux sont utilisés dans tout le territoire ancestral de la Nation métisse. Dans l’édition de février 2011 de Eagle Feather News, l’auteure métisse Maria Campbell écrit : « Notre pharmacie était à un peu moins d’un kilomètre, dans une prairie appelée Omisimaw Puskiwa (la prairie de la sœur aînée) où on trouvait en abondance l’achillée millefeuille, le plantain, l’églantier, l’épilobe à feuilles étroites, l’aster, l’ortie et l’amarante. Certaines de ces plantes médicinales étaient aussi comestibles, comme l’épilobe à feuilles étroites, l’ortie et l’amarante. »

Les plantes médicinales sont cueillies dans les environs, séchées et entreposées à la maison, puis réduites en poudre ou transformées en teinture, en infusion, en cataplasme ou en baume. Elles sont utilisées pour leurs propriétés analgésiques ou anti-inflammatoires, pour favoriser la digestion, ou encore pour soigner des maux très précis, comme l’arthrite, l’asthme, le diabète, les troubles gastro-intestinaux, la tuberculose, le cancer, le mal de tête ou de dents, le rhume, les pierres aux reins, le calcul biliaire, les maladies vénériennes, les troubles menstruels, les coupures et les éruptions cutanées. La cueillette des plantes médicinales est soumise à certains rituels : on doit adresser une prière au Créateur et faire une offrande, par exemple avec du tabac, en guise de « remerciement ». De plus, les cueilleurs de plantes médicinales doivent se contenter seulement de subvenir à leurs besoins, sans plus, et s’assurer de n’abîmer aucune autre plante lors de leur récolte.

Les quatre herbes sacrées, qui sont les plantes médicinales les plus utilisées par les Métis, sont le foin d’odeur (fwayn seukrii, fwayn di bufflo), le cèdre (li sayd), la sauge (l’arb du saint) et le tabac (li tabow). Ces herbes sont utilisées pour la purification, les offrandes sacrées et les prières. Parmi les autres végétaux à usage médicinal chez les Métis, mentionnons : la bardane (li grachaw), le sapin baumier (la gratelle), la salsepareille sauvage (sasperal), le bleuet (lii grenn bleu), le plantain majeur (plaanten), l’aronia (lii grenn), la berce laineuse (berce), les fruits de la viorne trilobée (lii paabinaw) et de la viorne comestible (moosomina), le pissenlit (pisanli), la racine de gingembre (sayn Jean, rasyn), la noisette (pakan), la pruche (carrot à moreau), le genévrier (aean naarbr si koom aen nipinet avik lii gren vyalet), le thé du Labrador (lii tii’d mashkek), l’écorce de chêne (ii kors di shenn), l’églantier (lii bon tiiroozh), la racine de sénéca (la rasinn), le sanicle du Maryland (la rasinn di coulyv), la résine d’épicéa (gum di sapin), la grande ortie (mazhaan), l’acore vrai (Belle-Angélique, weecase), la menthe des champs (li boum), l’ail du Canada (zayon faroosh), le thé des bois (pipisissew) et l’achillée millefeuille (li fleur blaan).

Des substances d’origine animale peuvent également servir de remèdes, comme l’huile de foie de lotte (mariah, morue d’eau douce), le bouillon à base de poisson (bouyon), la graisse d’oie, l’huile de mouffette (wil de shikaak), les ventouses de sangsues et les rats musqués. Comme beaucoup d’animaux se nourrissent de plantes médicinales, eux-mêmes peuvent avoir des propriétés curatives.

La menthe des champs, ou li boum, est l’une des principales plantes médicinales de la culture métisse. Elle est utilisée en infusion pour soigner le rhume et la fièvre, et sert aussi à traiter les menstruations trop abondantes et à prévenir les fausses couches. On la mélange également avec d’autres ingrédients pour traiter le cancer et le diabète. Ses fleurs sont utilisées pour soigner les maux de dents et l’inflammation des gencives; insérées dans les narines, elles aident à arrêter les saignements de nez.

L’acore vrai, ou weecase, traite également beaucoup de maux : rhume, toux, mal de dents, douleur liée à la pousse des dents, mal de tête, rhumatismes, douleur musculaire et vers intestinaux (en mâchant les rhizomes et en buvant le jus), maladies vénériennes (en appliquant la sève), cancer (en buvant l’infusion) et rhume (en étendant sur la poitrine un mélange de plante râpée et de graisse d’ours). On l’utilise aussi pour traiter différents troubles digestifs, dégager les voies nasales et respiratoires et éliminer les parasites intestinaux.

Le cycle saisonnier typique de l’établissement de la rivière Rouge au milieu du XIXe siècle

Printemps:
Chasse au canard, à l’oie, au cygne, à la grande poule-des-prairies, au faisan, à la perdrix, à l’orignal mâle, au chevreuil mâle, au wapiti mâle (cerf) et au grizzli des prairies. Pêche aux poissons frayants (brochet, doré jaune et esturgeon) à l’aide de fascines, de filets, de lances et de pièges. Trappe ou chasse au vison, à la loutre, au castor, au rat musqué, au lapin, au coyote et au loup. Récolte d’écorce de bouleau pour fabriquer des canots et des objets domestiques. Entaillage de l’érable et du bouleau, et semailles du blé et d’autres céréales.

Été:
Chasse au bison pour rembourser les dettes contractées auprès de la Compagnie de la Baie d’Hudson durant l’hiver et pour regarnir les réserves de nourriture. Chasse au loup, au coyote, à l’ours, à la grande poule-des-prairies, au lapin, à l’orignal, au chevreuil et au wapiti. Trappe de l’ours. Cueillette de bleuets, de racines de sénéca, de baies d’amélanchier, de framboises, de gadelles, de groseilles et d’aronias. Pêche au filet. Semailles et récolte de l’orge. Tonte des moutons.

Automne:
Chasse au bison pour approvisionner les comptoirs et faire des réserves de nourriture pour l’hiver. Chasse à l’orignal, au chevreuil, au wapiti, à la grande poule-des-prairies et à certaines espèces migratrices (canard, oie et cygne). Pêche aux poissons frayants comme le cisco ou le saumon à l’aide de fascines, de filets, de lances et de pièges. Trappe ou chasse à l’ours, au loup, au coyote, au vison, à la loutre, au castor, au rat musqué et au lapin. Cueillette du riz sauvage, des aronias, des baies d’amélanchier et des fruits de viorne trilobée. Récolte du blé. Abattage du bétail.

Hiver:
Trappe de la belette, du carcajou, du vison, de la loutre, du castor, du rat musqué, de l’ours, du renard et du lynx. Chasse à l’ours, au loup, au coyote, à la grande poule-des-prairies, au lapin, à l’orignal, au chevreuil et au wapiti. Pêche sur glace au filet. Chasse au bison dans les campements hivernaux.

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