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atlas des peuples autochtones du Canada

Faune

Pendant plus de 4 000 ans, les Inuits ont occupé une vaste étendue de terres, d’ eaux marines et d’ îles délimitées par le delta du Mackenzie, à l’ ouest, la côte du Labrador, à l’ est, l’ extrémité sud de la baie d’ Hudson, et les îles de l’ Extrême Arctique au nord. Adaptée spécialement au climat, aux milieux terrestre et marin ainsi qu’ aux écosystèmes, la culture inuite s’ est forgée peu à peu. L’ histoire inuite a pris forme, marquée par le maintien d’ un régime alimentaire sain.

Historiquement, l’ alimentation et la qualité de vie des Inuits ont dépendu des mammifères, des poissons et des oiseaux, qui foisonnent en Arctique. Chaque année, la disponibilité des ressources fauniques dicte le rythme des activités saisonnières de chasse et de pêche, nécessaires à une alimentation équilibrée et nutritive. Ce cycle annuel est manifeste dans le rapport des Inuits à leur territoire et dans leurs habitudes alimentaires.

Omble chevalier – Iqaluk (tariurmiutaq)

Poisson d’ eau douce le plus septentrional, l’ omble chevalier a été une importante source de nourriture saine pour les Inuits pendant des siècles. Il se mange cru, congelé (quak), séché (pipsi), fumé, vieilli ou cuit. Rempli de protéines et de vitamine B (dans la chair, la tête et les œufs), l’ omble chevalier contient également du calcium (dans la tête, la peau et surtout les os mous) et des acides gras oméga 3, qui favorisent la prévention de la cardiopathie et du cancer. Tous ces nutriments sont nécessaires non seulement à la réparation du corps, mais aussi à la formation des muscles et des tissus organiques. Très nutritifs, abondants et plutôt faciles à attraper, les ombles chevaliers font partie intégrante du mode de vie inuit. On utilisait parfois leur peau pour confectionner des imperméables, ou encore leurs os pour fabriquer aiguilles et trousses de couture.

Historiquement, l’ alimentation et la qualité de vie des Inuits ont dépendu des mammifères, des poissons et des oiseaux, qui foisonnent en Arctique.

Beluga – Qilalugaq (qaulutaq)

Le béluga est une source alimentaire importante pour de nombreuses communautés inuites. Sa peau épaisse et sa fine couche de graisse, le lard (maktaaq ou muktuk), constituent une spécialité traditionnelle de l’ Arctique. Bonne source de protéines et d’ acides gras oméga-3, le lard contient des nutriments essentiels comme le zinc et le rétinol, mais surtout de la vitamine C. On comprend donc pourquoi les Inuits n’ ont jamais été malades du scorbut. La peau et la graisse du béluga se mangent crues, vieillies, séchées, cuites ou bouillies dans des soupes et des ragoûts, alors que la viande rouge foncé se mange séchée (nikkuk), congelée, crue ou cuite. Le lard est souvent transformé en huile (misirak) pour la cuisson ou l’ éclairage au terme d’ une fermentation dans un milieu anaérobie, c’ est-à-dire dépourvu d’ oxygène. Encore de nos jours, le béluga est une spécialité gastronomique très prisée, servie en accompagnement de viandes séchées, congelées ou cuites. Un béluga peut contenir jusqu’ à 200 kilogrammes de viande et 50 kilogrammes de lard, dont on peut extraire quelque 300 litres d’ huile. Traditionnellement, la peau du béluga servait à recouvrir les bateaux.

Painting of a large grouping of caribou, two with gold antlers and the rest brown and black
Migration saisonnière par Teevee.


Caribou – Tuktu

Figurant parmi les principales sources alimentaires des Inuits du Canada, le caribou a occupé une place centrale dans l’ alimentation et la culture de ce peuple pendant maintes générations. La plupart des parties de l’ animal, riches en nutriments essentiels à la santé des Inuits, sont mangées – que ce soit crues, congelées, vieillies, cuites ou séchées. Le foie est une excellente source de protéines et de fer, tout comme la viande, ainsi que de vitamine C, à l’ instar de l’ estomac. La muqueuse intestinale est d’ ailleurs un plaisir tout spécial pour les papilles, au même titre que la très prisée moelle osseuse. Grâce à l’ énorme apport énergétique que fournit son gras, le caribou constitue une formidable source d’ alimentation, sans compter qu’ il contient ce qu’ il faut pour confectionner des vêtements et assurer la survie. Semblable à un isolant thermique, la peau de cet animal résiste aux températures extrêmes et à l’ humidité, ce qui en fait un excellent matériau pour des matelas ou des habits d’ hiver chauds. De plus, les tendons le long de la colonne vertébrale et dans les pattes arrière servent à la confection de babiches (ivalu) pour du fil, de la corde ou encore des chaussures, et les bois et les os entrent dans la fabrication d’ outils comme des coffres à aiguilles et des grattoirs. Fait intéressant : traditionnellement, les hommes utilisaient le velours des bois pour nouer leurs cheveux. Toujours au cœur du mode de vie des Inuits, le caribou a encore de multiples utilités de nos jours.

Bœuf musqué – Umingmak

Endémique de régions bien particulières en Arctique, le bœuf musqué est une précieuse source de nourriture qui recèle une foule de nutriments essentiels à la croissance et à la santé. En effet, la viande de cet animal est une excellente source de protéines et de fer, ainsi qu’ une bonne source de vitamine B. Longs et épais, les poils du bœuf musqué entrent autant dans la confection d’ articles de literie de grande qualité que dans celle de casquettes antimoustiques. On tricote aujourd’ hui avec la sous couche de laine (qiviut) de l’ animal, un tissu souvent jugé de plus grande valeur que le cachemire. Les artistes et les artisans inuits estiment grandement les cornes du bœuf musqué, qui deviennent translucides et malléables (un peu comme le verre fondu) quand elles sont chauffées à des températures extrêmes, juste avant d’ être soigneusement polies. Vivant en troupeaux mixtes de 10 à 20 individus, les bœufs musqués encercleront leurs petits si un loup (ou tout autre prédateur) les menace, en pointant leurs cornes acérées vers lui, prêts à charger. Ils ont l’ habitude de soulever les loups avec leurs cornes, de les projeter dans les airs, puis de les écraser avec leurs sabots. Aujourd’ hui, les Inuits chassent le bœuf musqué en se pliant à un système de quotas pour préserver cette espèce unique de l’ époque glaciaire.

Narval – Tuugaalik

Le narval, qu’ on retrouve dans le nord de l’ île de Baffin, est une source d’ alimentation des plus précieuses. En effet, sa viande séchée est bourrée de protéines et de fer, tandis que sa graisse sous-cutanée (maktaaq), en plus d’ être délicieuse, est riche en protéines et en vitamine A. C’ est aussi une bonne source de vitamine C, autrement très difficile à trouver dans une région où les fruits frais se font rares. Après avoir chassé un narval, les Inuits préfèrent généralement manger le maktaaq en premier, que ce soit cru, vieilli, cuit ou bouilli dans une soupe ou un ragoût. Traditionnellement, on se servait du lard comme huile d’ éclairage, le pétrole lampant clair qu’ il produisait étant préféré à l’ huile de phoque, qui avait le défaut de tacher les igloos de suie noire. L’ huile de narval (misirak) reste encore

Polar bear swimming in dark blue water looking over its shoulder
Nanuq, l’ ours polaire

Ours polaire – Nanuq

Se nourrissant exclusivement d’ animaux de la mer, l’ ours polaire s’ éloigne rarement de la banquise dérivante et vit principalement sur la glace marine. Lorsqu’ il s’ y déplace à la recherche de sa proie numéro un, le phoque annelé, il établit son domaine vital. Pour un seul individu, le domaine vital peut s’ étendre de 50 000 à 350 000 kilomètres carrés. Quoique considérée comme délicieuse, la viande de l’ ours polaire ne se mange pas crue, contrairement à celle d’ autres animaux, car elle est porteuse de nombreux parasites. Le foie n’ est jamais mangé non plus, car il peut entraîner une intoxication à la vitamine A susceptible d’ occasionner des maladies graves, voire la mort. Habituellement cuite au four ou bouillie dans une soupe ou un ragoût, la viande de l’ ours polaire est riche en fer et en protéines, comme la plupart des aliments prélevés dans la nature. Quant au gras, il fournit aux Inuits un apport en vitamine A et en acides gras oméga-3,. Les Inuits utilisent la fourrure de l’ ours polaire en couture; cela dit, cette pratique est moins répandue au Canada
qu’ au Groenland.

Phoque annelé – Natsiq

La population de mammifères marins de l’ Inuit Nunangat se compose principalement de phoques annelés. Dans presque toutes les communautés inuites, le phoque annelé est l’ aliment de base des plats traditionnels. Il s’ agit d’ ailleurs d’ une excellente source de sélénium. Regorgeant de protéines, de fer et de certaines vitamines B, la viande et les organes gardent les Inuits en santé et au chaud. On retrouve aussi énormément de vitamine A dans le foie et le lard, de même qu’ un peu de vitamine C. Les peaux de phoque sont extrêmement prisées en couture, car elles pèsent moins que les peaux de caribou et, étant gorgées d’ huile, elles résistent à l’ eau. Ce n’ est pas tout : leur surface poreuse laisse la sueur s’ évaporer. Ces caractéristiques font des peaux de phoque annelé un matériau idéal pour les bottes (kamiks) et les habits de chasse, portés à la lisière des glaces ou près des trous d’ air des phoques. Autrefois, les peaux servaient à construire des bateaux et des kayaks, parfois même des tentes. Certaines pratiques ont perduré jusqu’ à aujourd’ hui : les Inuits sont nombreux à porter des parkas et des pantalons en peaux de phoque en été et au printemps et, quand ils campent sur le territoire, ils utilisent la graisse de l’ animal pour alimenter les lampes à l’ huile de phoque (kudlik). La chasse au phoque, qui présente d’ importants avantages nutritifs et financiers, continue d’ occuper une grande place dans la dimension sociale de la culture inuite. Il suffit de regarder la panoplie de mots qui existent en inuktitut pour parler des différentes espèces, variétés et caractéristiques de phoques. Vecteur de transmission intergénérationnelle, la chasse au phoque est l’ occasion où peuvent se déployer pleinement les connaissances modernes et les traditions inuites sur la chasse et l’ écologie.

Dans presque toutes les communautés inuites, le phoque annelé est l’aliment de base des plats traditionnels.

A walrus up close - showing its eye, nose, whiskers and texture of its skin and fur
Un aiviq (un morse), dont la viande constitue une source alimentaire équilibrée.

Morse – Aiviq

Le morse offre un apport équilibré en nutriments : la peau (kauk) regorge de protéines, tandis que le lard (servi cru, vieilli ou bouilli) contient des acides gras oméga-3, et beaucoup de vitamine A. Les Inuits raffolent spécialement de la viande des jeunes morses, tant crue que bouillie. D’ ailleurs, la viande fermentée et vieillie (igunak) en milieu anaérobie n’ a pas perdu son statut de spécialité traditionnelle. Elle est préparée ainsi : d’ abord, les chasseurs entreposent la peau, le lard et la viande, puis laissent le tout fermenter; ensuite, ils empilent la peau et le lard de quatre ou cinq morses pour former un tas d’ environ trois mètres de large; enfin, ils recouvrent la viande de grosses roches pesant jusqu’ à 50 kilogrammes pour la protéger des charognards. Dans le temps, la peau de morse était une source majeure d’ approvisionnement en cuir. Les Inuits s’ en servaient pour construire des toits, fabriquer des bottes, et même revêtir la charpente des grands bateaux familiaux (umiaq) qui transportaient les passagers et l’ équipement de campement.

Baleine boréale – Arviq

Autrefois, la baleine boréale représentait une ressource indispensable pour les Inuits, puisqu’ elle était en plein cœur de leur alimentation traditionnelle. Ce pourrait redevenir le cas, à condition que la population de baleines boréales continue de croître. Quand des chasseurs réussissaient une capture, leur prise allait permettre de ravitailler, d’ équiper, d’ abriter, de chauffer et d’ éclairer tout le village. En effet, le lard n’ était pas seulement un aliment plein de vertus, c’ était aussi la source d’ huile par excellence pour l’ éclairage et le chauffage. Les os, eux aussi, étaient très pratiques. Par exemple, les gros os des côtes et la mâchoire servaient à soutenir les toits, les vertèbres, à fabriquer des billots à découper, et certains autres os, à confectionner des outils et des patins de traîneau. On utilisait le fanon pour attacher les traîneaux (kamutiks), les harpoires et l’ armature des kayaks. Une seule baleine boréale suffisait à subvenir aux besoins d’ un établissement inuit pour toute une année. En vertu des ententes sur les revendications territoriales, les régions de l’ Arctique de l’ Est et de l’ Ouest ont récemment connu une reprise de la chasse, limitée et bien gérée. Dans un autre ordre d’ idées, soulignons que la baleine boréale se démarque à deux égards. D’ abord, des études ont permis d’ estimer que la baleine boréale de l’ Arctique de l’ ouest pouvait vivre au-delà de 200 ans, soit plus longtemps que la tortue, ce qui en fait l’ une des espèces ayant la plus grande longévité sur la Terre. Ensuite, la baleine boréale est si forte qu’ elle peut percer l’ épaisse glace arctique pour former des trous d’ air.

A hand-drawn sepia toned map showing the nesting locations of geese
Un Inuit appelé Salia a tracé pour le naturaliste canadien J. Dewey Soper cette carte de la partie centre-ouest de l’ île de Baffin, indiquant les endroits de nidification des oies.

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