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atlas des peuples autochtones du Canada

Litiges et tribunaux

Depuis la Déclaration universelle des droits de l’ homme, adoptée en 1948, l’ idée que la dignité humaine passe par le respect et la défense des droits universels de la personne s’ est de plus en plus imposée à l’ international. En 2007, l’ Assemblée générale des Nations Unies a adopté la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, un ensemble d’ articles internationalement convenus reconnaissant et affirmant les droits propres aux peuples autochtones du monde. Si le Canada, ainsi que quelques autres nations coloniales, s’ est d’ abord opposé à cette déclaration, il est revenu sur sa décision en 2016. Parmi les droits énumérés dans le document, on retrouve :

• le droit, à titre collectif, de vivre dans la liberté, la paix et la sécurité en tant que peuples distincts et [de ne faire] l’ objet d’ aucun acte de génocide ou autre acte de violence, y compris le transfert forcé d’ enfants autochtones d’ un groupe à un autre (article 7);

• le droit de ne pas subir d’ assimilation forcée ou de destruction de leur culture (article 8);

• le droit à réparation, par le biais, notamment, de la restitution ou, lorsque cela n’ est pas possible, d’ une indemnisation juste, correcte et équitable (article 28).

– Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, 2007

Toute violation de ces droits ou des nombreux autres que contient la Déclaration porterait atteinte non seulement aux individus concernés, « mais également aux normes minimales nécessaires à la survie, à la dignité et au bien-être des peuples autochtones du monde » (article 43). En arrachant des enfants à leur foyer et à leur communauté, en déconstruisant de manière systématique les formes traditionnelles de loi, de gouvernance, de médecine et de spiritualité, en refusant aux peuples autochtones le droit à l’ autodétermination, en leur enlevant le pouvoir de déterminer qui fait partie de la communauté et en les relocalisant de force, le Canada a perpétué pendant longtemps des gestes allant à l’ encontre des droits de la personne et des peuples autochtones. Ces attaques systémiques, perpétrées à coups de politiques et de lois, ont contribué de manière directe à la condition sociale et à la viabilité culturelle des Autochtones du pays. En d’ autres mots, elles sont la raison pour laquelle les Autochtones sont désavantagés au chapitre de la qualité de vie, de la santé et du bien-être.

Dans les années 1990, le mouvement activiste découlant du triste héritage des pensionnats indiens commençait à prendre de l’ ampleur, entraînant avec lui un besoin d’ entreprendre des actions en justice. En 1996, un groupe de 27 survivants a intenté un recours collectif contre le gouvernement du Canada et l’ Église Unie du Canada pour des allégations de mauvais traitements perpétrés à l’ Alberni Indian Residential School, sur l’ île de Vancouver, en Colombie-Britannique. Ce dossier, l’ affaire Blackwater c. Plint (2005), a duré neuf années, au terme desquelles la Cour suprême du Canada a statué que les Églises, à titre d’ organismes de bienfaisance, ne pouvaient invoquer l’ immunité devant les dommages-intérêts, et étaient donc autant responsable que le gouvernement. Par leur lutte et leurs témoignages, les courageux demandeurs ont établi un précédent  pour des milliers d’ autres règlements et, ultimement, donné lieu à la création de la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens (2006)

Dans les années 1990, le mouvement activiste découlant du triste héritage des pensionnats indiens commençait à prendre de l’ ampleur, entraînant avec lui un besoin d’ entreprendre des actions en justice.

Cette convention – signée par des survivants, des dirigeants des Premières Nations et des Inuits, des représentants des Églises unie, anglicane, presbytérienne et catholique, et le gouvernement du Canada – constituait à l’ époque le plus important règlement de recours collectif de l’ histoire canadienne. Elle prévoyait deux méthodes d’ indemnisation des survivants. D’ abord, le Paiement d’ expérience commune (PEC), dont la date limite de demande était en septembre 2012, dédommageait toute personne ayant fréquenté l’ un des 139 pensionnats indiens énumérés dans la Convention, à hauteur de 10 000 $ pour la première année de scolarité, et de 3 000 $ pour toute année (ou partie d’ année) subséquente. La deuxième forme d’ indemnisation, le Processus d’ évaluation indépendant (PEI), était destinée aux personnes ayant enduré des violences physiques ou sexuelles.

Les survivants qui se sont soumis au PEI ont dû dévoiler les détails des maltraitances subies – durée, identité des agresseurs, renseignements médicaux et personnels – dans le cadre d’ une audience. Dans un cas comme dans l’ autre, le processus d’ indemnisation était éprouvant pour les familles et les survivants, dont la plupart ont rompu le silence pour la première fois, rouvrant par le fait même de vieilles blessures. Bon nombre ont vécu de nouveaux traumatismes parce qu’ ils ont essuyé un refus ou qu’ on n’ a pu confirmer qu’ ils avaient fréquenté un pensionnat, ou encore à cause des failles du processus ou du rejet de leur demande. Encore aujourd’ hui, la mise au point de processus de dédommagement respectueux, sécuritaires et équitables pour des violences sexuelles ou physiques ou des transgressions des droits de la personne perpétrées à grande échelle demeure une entreprise difficile au Canada.

La Convention prévoyait en outre du financement supplémentaire pour que la Fondation autochtone de guérison continue ses activités communautaires jusqu’ en 2014, et un fonds pour des projets de commémoration afin que les communautés touchées puissent rendre hommage aux anciens pensionnaires d’ une manière qu’ elles jugent appropriée. Elle a également financé la Commission de vérité et réconciliation (CVR), qui a donné naissance, en fin de mandat, au Centre national pour la vérité et réconciliation, une organisation permanente. La CVR a aussi demandé la création d’ un poste de commissaire aux langues autochtones et d’ un conseil national de réconciliation.

Le 11 juin 2008, Stephen Harper, alors premier ministre, a présenté des excuses publiques aux personnes touchées par les pensionnats indiens. Faisant exceptionnellement front commun, les chefs du Parti libéral, du Nouveau Parti démocratique et du Bloc Québécois ont également présenté des excuses officielles, reconnaissant que les torts causés aux Autochtones transcendaient les affiliations politiques et nous rappelait brutalement notre responsabilité, en tant que Canadiens, d’ endosser nos gestes passés.

Des représentants de groupes autochtones et des survivants de tout le pays ont entendu le discours sur place à la Chambre des communes.

Le fardeau de cette expérience pèse sur vos épaules depuis beaucoup trop longtemps. Ce fardeau nous revient directement, en tant que gouvernement et en tant que pays. Il n’ y a pas de place au Canada pour les attitudes qui ont inspiré le système de pensionnats indiens, pour qu’ elles puissent prévaloir à nouveau. Vous tentez de vous remettre de cette épreuve depuis longtemps, et d’ une façon très concrète, nous vous rejoignons maintenant dans ce cheminement. Le gouvernement du Canada présente ses excuses les plus sincères aux peuples autochtones du Canada pour avoir si profondément manqué à son devoir envers eux, et leur demande pardon.

– Stephen Harper, premier ministre du Canada,
le 11 juin 2008

Les poursuites, les excuses et les règlements, bien qu’ ils ne constituent qu’ un petit pas vers un objectif plus vaste de réconciliation, ont le mérite de s’ attaquer à un système juridique colonial complice de la dépossession et de la marginalisation des communautés autochtones, et de faire la lumière sur un tort collectif jusqu’ à tout récemment ignoré.

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